Etude Taylor
Cette recherche a été commandée par le département des transports du ministère anglais de l'équipement, en complément du rapport sur la vitesse publié en 2000. Le but était de préciser le rôle de la vitesse dans la survenue d'accidents sur les différents types de voies non autoroutières hors agglomération en fonction des caractéristiques de ces voies.
Le problème était de préciser la relation générale entre vitesse et risque présentée dans le rapport de 2000. Ce dernier présentait en particulier l'illustration suivante extraite d'une publication d'Anderson et Nilson (Speed management in Sweden - Swedish National road and transport institute -1997) indiquant la variation du risque en fonction de la vitesse, ainsi que la variation de la gravité des blessures en utilisant trois catégories : tous les accidents corporles, les accidents mortels ou avec blessures graves (KSI = killed or severely injured) et les accidents mortles. Il convenait de préciser si cette variation du risque était identique ou non sur différents types de voies.
L'étude a concerné les "rural single carriageway", le terme désignant un ensemble étendu de voies classées A, B, C ou non classées, ce qui couvre des débits allant sur les sites étudiés de 106 véhicules jours à 25 750. En pratique les voies exclues de l'étude étaient les autoroutes (motorways), les 4 voies à chaussées séparées (Major 2x2) et les voies urbaines (urban roads).
Le résumé de ce rapport est traduit intégralement à la fin de cette page. Le texte original est également accessible.
Plusieurs graphiques illustrent ce texte et le plus démonstratif est celui qui illustre le risque d'accident sur les sections de voies étudiées en fonction des vitesses moyennes et d'un classement en quatre groupes. Il met en évidence l'importance des caractéristiques de la voie sur le risque en fonction de la vitesse moyenne pratiquée. Le groupe 1 correspond aux voies les plus dangereuses, malgré les faibles vitesses de circulation. La pente de la courbe (qui représente la variation du risque en fonction de l'accroissement de la vitesse) est plus accentuée que dans les autres groupes. En terme de prévention des risques d'accident cela signifie qu'une réduction de vitesse identique en valeur absolue épargnera plus de vies sur une route du groupe 1 que du groupe 4. Mais, et c'est le point important, la vitesse augmente le risque sur chaque type de voie et si l'on raisonne en pourcentage d'accroissement de la vitesse, et non en valeurs absolues, les situations seront identiques sur les différents groupes de voies.
Résumé du travail de Taylor et collaborateurs (traduction du texte du rapport).
Introduction
Le rapport gouvernemental sur la vitesse, publié en mars 2000, insistait sur le
besoin d'une meilleure connaissance du rôle de la vitesse sur les accidents sur
les "rural roads" (dans la définition anglaise il s'agit des voies non
autoroutières à chaussées non séparées identifiées par les lettres A, B, C, ou
non classées, elles correspondent à nos routes nationales ou départementales).
Un programme de recherche du TRL couvrant la dernière décade a démontré sans
doute possible que plus les usagers choisissaient de conduire vite, plus ils
courraient de risque d'être impliqués dans un accident, et que les vitesses plus
élevées sur les routes ayant par ailleurs des caractéristiques similaires
étaient associées à un plus grand nombre d'accidents. Ce programme incluait un
projet financé par l'Union Européenne et connu sous le terme MASTER, dans lequel
une relation vitesse-accident (le modéle EURO) était établi pour les voies
européennes de type "rural single carriageway" (voies hors agglomération à
chaussées non séparées). La complexité inhérente à des analyses de ce type,
associé au nombre limité de données utilisables dans le projet MASTER ont eu
pour conséquences une difficulté d'interprétation du rôle de la vitesse dans le
modèle EURO. Une quantité limitée de données sur lesquelles le modèle avait été
produit provenaient du Royaume Uni. Du fait de ces limitations, la division des
routes du département des transports du ministère de l'équipement britannique a
demandé au TRL de développer des recherches plus extensives sur la relation
entre la vitesse et les accidents sur les "rural single-carriageway roads"
en Angleterre. Ce rapport décrit cette étude. Il comprend :
la sélection des sites,
la collecte et l'analyse des données provenant d'un total de 174 sections de routes hors agglomération, incluant les données sur les accidents corporels, le flux de circulation et les données sur les vitesses des véhicules, ainsi qu'un grand nombre de détails sur les caractéristiques des routes, leur géométrie, et leurs abords,
l'application de méthodes statistiques pour classer les sections de routes en groupes relativement homogènes, en tenant compte de leurs caractéristiques d'accidents en rapport avec la vitesse,
une modélisation statistique pour établir la relation entre la fréquence des accidents et d'autres facteurs tels que le flux de circulation, la vitesse des véhicules, et les caractéristiques propres de la voie.
Les sites étaient tous situés sur des routes avec une limitation de vitesse à 60 miles par heure. L'échantillon était stratifié pour couvrir toutes les classes de routes et pour avoir une bonne distribution géographique, une amplitude étendue de flux de circulation, de dénivelées, de courbes, d'accès et de carrefours. Une amplitude importante des vitesses (26 à 58 miles/h et des taux d'accidents (0 à 271 par 100 millions de véhicules x kilomètres a été observée.
Résultats
Les groupes homogènes de voies entre lesquels les sections retenues ont pu être
classés furent définis par un ensemble de 6 variables : taux d'accidents,
vitesse moyenne, faible densité d'intersections, densité des courbes, densité
des accès (c'est à dire densité des voies privées et des autres accès rejoignant
la route). Ces caractéristiques réunies reflétaient les caractéristiques
opérationnelles de la route, ou "qualité de la route" et peuvent être définies
comme suit :
groupe 1 : routes avec dénivelées importantes ("very hilly"), avec un taux élevé de courbes et une vitesse moyenne basse. Il s'agit de routes de faible niveau de qualité ("low quality roads"),
groupe 2 : routes avec un grand nombre d'accès, un taux de courbes au dessus de la moyenne et une vitesse moyenne au dessous de la moyenne. Il s'agit de routes de qualité au dessous de la moyenne,
groupe 3 : routes avec une densité élevée d'intersections, mais avec une densité de courbes et des dénivelées inférieures à la moyenne et une vitesse de circulation au dessus de la moyenne. Ce sont des routes d'une qualité au dessus de la moyenne,
groupe 4 : routes avec une faible densité de courbes, de carrefours et d'accès, et avec une vitesse de circulation élevée. Ce sont des routes de qualité élevée.
Les modèles développés pour mettre en relation la fréquence des accidents et d'autres facteurs explique une grande partie de la variation des données et les effets des variables clés furent établis comme étant puissants, plausible et très stables ("strong, plausible and very stable").
Les modèles montrent que :
la fréquence de toutes les catégories d'accident augmente rapidement avec la vitesse moyenne. L fréquence de la totalité des accidents corporels s'accroît suivant la vitesse à la puissance d'environ 2,5 ce qui signifie qu'un accroissement de 10% de la vitesse moyenne produit un accroissement de 26% de l'ensemble des accidents corporels,
la relation entre la fréquence des accidents, le flux de circulation et la longueur des sections de raccordement ("link sections length") reproduit ce qui observé dans d'autres études de même nature,
la fréquence des accidents varie entre les groupes de voies définies ci-dessus. Il a été le plus élevé dans le groupe 1 et environ respectivement la moitié, le ties et le quart de ce niveau sur les routes des groupes 2, 3 et 4,
la fréquence de l'ensemble des accidents corporels se révéla également en croissance rapide avec deux autres valeurs, celles de la densité en virages accentués (ceux avec un chevron ou un avertissement de virage) et la densité des intersections avec des voies secondaires. L'accroissement des accidents était de 13% et 33% respectivement par virage ou carrefour supplémentaire au kilomètre. Les accidents à un seul véhicule étaient particulièrement affectés par la densité des virages accentués (accroissement de 34% de la fréquence des accidents par virage supplémentaire au kilomètre),
l'effet observé de la vitesse moyenne a été particulièrement important pour les accidents d'intersection ; ces accidents sont grossièrement proportionnel à la puissance 5 de la vitesse, suggérant un potentiel important de réduction des accidents par des stratégies destinées à affaiblir la vitesse aux intersections,
aucune autre mesure de vitesse n'a été capable d'influer aussi fortement sur la fréquence des accidents que la vitesse moyenne, isolément ou en association avec la vitesse moyenne,
le pourcentage de réduction de la fréquence des accidents par une réduction de 1 mile/h de la vitesse moyenne impliqué par la relation établie pour l'ensemble des accidents dépend de la vitesse moyenne. Il s'étend de 9% pour une vitesse moyenne de 27 miles/h à 4% pour une vitesse moyenne de 60 miles/h,
l'effet de la vitesse sur les accidents graves et mortels était plus important (mais non statistiquement significatif) que pour l'ensemble des accidents. Un accroissement de 10% de la vitesse moyenne devrait provoquer un accroissement de 30% de la fréquence des accidents graves ou mortels.
Discussion
Les modèles présentés dans ce rapport diffèrent du modèle EURO précédent par plusieurs aspects. Ils sont beaucoup plus robustes ("substantially more robust"), étant fondés sur une base de données plus structurée, extensive et pertinente. Elles prédisent un effet plus important de la vitesse sur les accidents que ne le fait le modèle EURO. Cependant, en termes de potentiel de réduction des accidents, les politiques de gestion de la vitesse appliquées à des voies urbaines sont encore probablement aptes à produire des bénéfices plus importants. Ceci à cause du nombre beaucoup plus important d'accidents survenant sur ces routes (et de leur distribution plus concentrée).
Il y a encore un travail important à produire pour développer les bases d'une politique de gestion sur les voies hors agglomération. Les objectifs à atteindre, développés extensivement dans le rapport gouvernemental sur la vitesse, incluent :
le besoin de définir une hiérarchie des routes, s'accordant avec leurs fonctions,
le besoin de définir ce que sont les vitesses appropriées aux différents types de voies en fonction de cette hiérarchie,
le besoin d'identifier les moyens permettant d'obtenir ces vitesses appropriées,
le besoin de définir une politique de définition des vitesses maximales, tenant compte de la hiérarchie des voies et des vitesses appropriées que l'on souhaite voir adopter,
Le présent rapport produit une base permettant de progresser vers ces objectifs. La classification des routes en groupes reflétant leur qualité a été fondamental pour l'étude produite et cette classification est capable de contribuer à définir une hiérarchie des routes.
Conclusions
L'étude a atteint son objectif de développement d'une relation entre la vitesse et les accidents sur les routes anglaises non autoroutières en dehors des agglomérations qui est clairement compréhensible et applicable. L'analyse statistique a franchi les difficultés inhérentes à ce type d'étude en séparant les actions de variables qui ont des corrélations entre elles.
La relation prédictive qui a été établie pour l'ensemble des accidents montre que la fréquence des accidents croit rapidement avec la vitesse moyenne sur une route donnée. La relation peut être utilisée pour estimer la modification dans la fréquence des accidents produite par une modification de la vitesse moyenne, et appliquée à des donnée statistiques locales ou nationales, d'estimer les effets de différentes stratégies de gestion de la vitesse.
La classification des routes en groupe reflétant la qualité des routes, qui sous tend cette analyse, a la capacité de fonder le développement d'une hiérarchie des routes prises en considération (rural-single carriageway roads).